On a envie d’associer l’idée de cinéma à celles de poésie et de liberté. Malheureusement on ne retrouve rien de cela dans le dernier film de Nicole Garcia. Il semblerait que cette absence de liberté, de souffle, de vie vienne du scénario, ou plus exactement de la place qu’il lui a été laissée. Nicole Garcia s’est trop appuyée sur le scénario de Jacques Fieschi, construit comme un puzzle, dont la précision donne au film un aspect étouffant.
Cette sombre histoire de suicide d’un des grands joailliers de Paris tourne rapidement en rond. Sachant qu’un excellent scénario ne donne pas forcément un bon film, le risque était grand pour Nicole Garcia de s’appuyer autant sur une trame dont l’inconsistance risque bien de provoquer à la projection de l’avant-dernière bobine des bâillements. L’Atalante de Jean Vigo, vient nous rappeler que l’on peut aboutir à un chef-d’œuvre avec une histoire insipide. Place Vendôme distribue au compte-gouttes les informations, réservant des moments de suspens, multipliant les pistes. On ne voit à l’écran que des pions permettant au scénariste de faire avancer son histoire. Hélas, ce ne sont pas des personnages. Il y a dans Providence d’Alain Resnais, un passage où le romancier, écrivant son histoire, est surpris par les goûts de ses personnages, qu’il ignorait lui-même. Mais les intervenants de Place Vendôme sont, eux, dénués de vie propre.
Bien sûr, on rétorquera que la froideur de l’entreprise rappelle le monde des joailliers ; le sentiment d’enfermement que ressent le spectateur, la place Vendôme, (lieu principal de tournage) ; la manipulation du scénariste, celle des personnages les uns envers les autres… Pourtant, de même que les comédiens savent bien que le meilleur moyen d’exprimer un sentiment de joie ne réside pas forcément dans un éclat de rire, la distorsion qui peut exister entre une forme et un fond révèle d’abord une démarche audacieuse et surtout crée souvent du sens. Cela dit, l’apathie générale du film viendrait presque faire oublier la prestation des comédiens, dont le jeu s’est bien fondu dans la mise en scène de Garcia. Mettons de côté Emmanuelle Seigner dont le regard inexpressif et le jeu parfois outrancier laissent l’impression que tous les dialogues qu’elle prononce sonnent faux. Mais là, le scénariste-dialoguiste n’y est pour rien…