Théoricien réputé du scénario et adepte de la psychothérapie, Yves Lavandier a pour son premier long métrage joué la carte de l’honnêteté. Oui, mais… est le film de quelqu’un qui connaît son sujet mais refuse de le traiter trop au sérieux ou de rivaliser par ses compétences avec un cinéma d’auteur. En effet, pour nous raconter le parcours d’Eglantine (Emilie Dequenne, étrangement rajeunie pour paraître 17 ans), sa rencontre avec le psychothérapeute joué par Gérard Jugnot, Lavandier a choisi le ton d’une comédie insignifiante, la bluette adolescente façon AB Production -et on exagère à peine. Eglantine est amoureuse de Sébastien, mais sa peur de la sexualité et une mère dépressive l’empêche de profiter de cet éveil amoureux. Elle se rend chez le psy Erwan Moenner dans l’espoir de pouvoir lui confier ses problèmes. Commence alors la thérapie de la jeune fille, autour de laquelle s’articule le film.

Les quinze premières minutes, on frémit à voir jouer faux les lycéens et Jugnot expliquer face caméra les bienfaits de la thérapie. On est aussi agacé par cette pédagogie mielleuse et les espiègleries du docteur, et on doute que Lavandier parvienne à filmer la thérapie comme elle le mérite. Pourtant, assez vite, ces critiques tombent d’elles-mêmes : ce qui nous apparaissait comme des faiblesses s’avère des choix délibérés, qui se révèlent plutôt cohérents. L’originalité de Oui mais… est dans la franchise de sa démarche et, finalement, l’audace de sa construction. Les complexes d’Eglantine et sa culpabilité permanente face à sa mère sont l’objet d’une analyse perspicace, jamais ennuyeuse. Ce procédé finit même par installer un certain charme, voire une émotion, et laisse filtrer quelques beautés fugaces (la scène de dépucelage, très réussie). La direction d’acteurs fait son effet sur la longueur, et malgré ses dehors convenus, se révèle assez sensible.

Pourtant, une gêne demeure qui tient d’abord au manque de rythme du film et à une mise en scène très peu inventive. De plus, si le duo Jugnot / Dequenne fonctionne, la médiocrité des seconds rôles est un sérieux handicap. Surtout, ce que Oui, mais… gagne en finesse d’observation et en argumentation psychologique, il le perd en densité et en crédibilité dramatiques. Les problèmes d’Eglantine et de ses parents ne sont pas diffus dans la vie de tous les jours, mais c’est au contraire le quotidien qui vient illustrer le discours du thérapeute. Ca donne des situations volontiers caricaturales : de la discussion avec la copine à propos de la « première fois » aux affrontements avec une mère alcoolique et un père obtus ; l’intrigue et les personnages enfoncent pas mal de portes ouvertes. Malgré tout, Oui mais… reste une tentative intéressante, ne serait-ce que par la manière complètement décomplexée et hors mode dont Lavandier aborde le cinéma.