Spécialistes ès sécrétions, les Farrelly brothers remontent ici à la source même de leur inspiration -pour ne pas dire de leur passion-, l’intérieur du corps humain. Qu’on ne s’attende surtout pas à un austère cours d’anatomie ou à une exploration psychédélique de nos entrailles façon Richard Fleischer et son Voyage fantastique avec une pimpante Raquel Welch moulée dans une combinaison de plongée, on connaît suffisamment le binôme pour savoir que leur aventure intérieure sera forcément crado.

L’habituel registre pipicacapopo est donc bien exploité mais, surtout, Osmosis Jones est le film du métissage permanent et ludique. Les matières, pas forcément fécales (dès que l’on pénètre à l’intérieur du corps humain la prise de vue réelle laisse place au cinéma d’animation réalisé par Piet Kroon et Tom Sito ), les genres (à la parodie du « buddy movie » façon L’Arme fatale se greffe un pamphlet politique et des moments de pur divertissement), les publics (adultes/enfants, le film s’adresse successivement ou simultanément aux deux) s’y mêlent allègrement dans un délirant va-et-vient entre le « in » et le « out » du corps de Frank (Bill Murray). Adepte convaincu de la junk-food, Frank n’est qu’un blob flasque et graisseux se déplaçant avec grande difficulté mais qui gobe goulûment le moindre aliment qui se présente devant son nerf optique, même un oeuf dur tombé par terre et qui a auparavant transité par la bouche d’un singe ! Absence d’hygiène alimentaire, d’hygiène tout court, le bedonnant et inconscient Frank avale ainsi, outre les habituels glucides et autres lipides, un virus nommé Thrax. Dans cet organisme passablement délabré (le fait d’avoir appréhendé le corps humain comme une mégalopole déliquescente est l’une des grandes idées et réussites du film) sévit heureusement Osmosis Jones, un anti-corps ultra combatif qui n’hésitera pas, aidé de la pilule anti-rhume Drix, à affronter ce fléau mortel.

Haletante course contre la montre biologique, le film se refuse le moindre temps mort, à tel point que l’indigestion finit par pointer son nez. Mais selon le très efficace phénomène des vases communicants, les frères Farrelly déversent alors ce trop-plein vers l’extérieur ; sous forme, au choix de vomi, de pus, etc. Depuis Mary à tout prix, personne ne regarde plus un tube de gel de la même façon, il y a fort à parier qu’après Osmosis Jones notre vision des huîtres aura changé. Voilà qui tombe à point pour les fêtes de fin d’année.