Pourquoi se souvenir de Mon voisin le tueur – Episode one ? Une seule raison : la prestation de Matthew Perry, acteur-messie dont il faut chanter la folie déréglée, l’un des comédiens les plus radicalement étranges et inconsolables d’aujourd’hui. Que fait Perry dans les films (médiocres) qu’il interprète ? Deux choses : d’abord, poursuivre l’existence de Chandler Bing, le personnage de la sitcom Friends qu’il a incarné durant dix ans, selon d’autres moyens, mais avec le même horizon. Persévérer dans l’anomalie, continuer cette vie de demi freak discret (souvenez-vous : Chandler et son troisième téton, son doigt de pied sectionné, son patronyme refoulé). Ensuite, affiner sa figure mi-scout mi-malade de corps souffrant, ouvert à tous les accidents, mutilations, dérangements passagers, disponible à tout un spectre de la douleur allant de la simple indisposition aux coups et aux chutes les plus spectaculaires, pour peu qu’un certain ordre du monde se maintienne et le laisse en son milieu comme réceptacle à ses couacs, lui offre en contrepartie un dénouement heureux à ses dilemmes sentimentaux. Perry serait l’inventeur d’un burlesque sacrificiel, poussant la maladresse d’un Pierre Richard jusqu’à son point de rupture, une sorte de tragédie ou de malédiction à l’issue paradoxalement heureuse. Témoigne de tout cela son incroyable propension à se prendre des objets de formats divers en pleine figure ou dans les parties génitales.

Mon voisin le tueur 2, insipide tout comme son aîné, n’ajoute ni ne retranche pas grand-chose, sinon rien, à cette figure quasi mystique. Bruce Willis quant à lui y revient chevelu, stabilisé par des pantoufles à tête de lapin et un tablier de ménagère, occupé à nourrir des gallinacés mexicains qui lui font la conversation. Il est retraité du monde du crime, mais la libération de son ancien boss, Gogolak, le replonge lui, son amie apprenti tueuse à gages, son ancien voisin le dentiste Matthew Perry et sa femme (ex de Bruce), dans les affaires. Il n’y a pas grand-chose à dire sur le film, Perry y piétine, le versant kill-comédie est assuré par un mollasson éloge de l’assassinat, le reste est à l’avenant. Il n’y a aucune raison de se souvenir de Mon voisin le tueur 2, tout ce qu’y dévoile notre ami Perry étant déjà certifié fascinant depuis longtemps. Et n’ayant personne à séduire (il est déjà marié), sa mécanique ésotérique tourne à vide.