L’Iraq étant le sujet chaud à Hollywood, c’est au tour du petit soldat Redford de rendre sa copie. Le résultat est plutôt blême : un récit laborieusement articulé autour de six personnages mêlant fiction politique (Tom Cruise, sénateur, vs. Meryl Streep, journaliste intègre et romantique), initiation (Redford en vieux prof bienveillant face à un élève retors) et film de guerre (deux gamins balancés comme de la chair à canon en Afghanistan). Le film renvoie dos à dos toutes les hypothèses qu’il formule mais manque, dans sa volonté d’étaler sa sagesse bien-pensante, d’amplitude et de recul. La fiction politique (interminable discussion de carnaval dans un bureau) vire au simplisme et la leçon archi-pédago de l’acteur en vieux prof dur mais sympa est d’une platitude meurtrière. Quant à la partie film de guerre, elle patine comme une simple illustration sans relief de ce que le film évoque – déjà bien lourdement – par les mots échangés dans des intérieurs feutrés.

D’une certaine manière, Lions et agneaux est l’antithèse du Royaume de Peter Berg, suite de visions cauchemardesques qui s’épuisent dans une immédiateté asphyxiante et poussive. Mais le principe de sérénité prôné par Redford ne vaut guère plus, empilant les clichés et les portes ouvertes avec une fausse modestie qui rappelle combien Clint Eastwood, dans la constellation des vieux paters hollywoodiens, flotte à des années lumières de ses pairs. Sans la naïveté un brin hallucinée d’un Kevin Costner, sans la sagesse d’un Eastwood, Redford se place dans un ventre mou assez ingrat. On ne peut pas reprocher au film de vouloir jouer les gros durs (mis à part les cachets alloués aux acteurs, le film n’a pas du coûter grand-chose), mais plutôt sa sérénité érigée en pure posture, une sorte de leçon fade et sans contenu : ni ambiguïté ni gros scoop concernant le retour démocrate dans le panorama US. Bref, juste un apéritif en attendant le formidable Redacted de Brian de Palma.