Comme son cousin Godsend sorti il y a peu, Les Témoins souffre du syndrome du nanar estival mal digéré. Même indigence du scénario, même sérieux plombant, même maladresse à utiliser l’imagerie de l’horreur, même revendication esthétique de gothiquiser à qui mieux mieux. Enfin, même volonté de suivre les traces d’une tradition cinéphile flamboyante locale, quelque part entre le Village des damnés et Hitchcock période Rebecca.

Petite explication : les témoins sont des voyeurs spécialisés dans le mauvais présage. Damnés par la grâce divine pour matage vicieux devant la crucifixion de Jésus, ils sont toujours présents lors des petites et grandes tragédies qui ont ponctué l’histoire de l’humanité. C’est laborieusement expliqué par Brian Gilbert, faiseur british à la petite semaine (du douteux Jamais sans ma fille au cultissime Oscar Wilde), qui sûrement par peur de ne pas se faire comprendre, ne lasse pas de définir le concept. Dès l’ouverture, scène éloquente où l’on découvre un Christ face à une armada de statues inquiétantes dans une église enfouie sous terre, on glisse davantage dans l’illustration pédagogique que dans l’incursion dans l’horreur. Or attention, Gilbert veut toujours garder une longueur d’avance, seulement il n’est pas franchement un pro de la distillation d’information. Alors les curetons du coin s’en mêlent : ils prennent une mine contrite de gardiens de tabou mal dans leur peau et tentent d’empêcher un archéologue cartésien de percer le mystère. Puis l’un d’entre eux veut en savoir plus et joue au petit Brian De Palma : du film Zapruder à L’Encyclopédie Universalis sur CD-Rom, il détecte ces mêmes oiseaux de mauvais augure dans tous les arrières-plans d’images des grands crimes de l’histoire. Et ainsi de suite.

Plus trop de temps ni d’espace pour la moindre tentative horrifique, expédiées piteusement à coup de gros effets visuels d’un kitsch à se rouler par terre. En fait, Brian Gilbert n’a confiance en personne. Ni au spectateur, qui abreuvé de confirmation et de surconfirmation, est pris sans cesse pour un handicapé moteur, ni au genre que le cinéaste préfère substituer à une psychologie de dépôt vente, ni même aux personnages, souvent là pour meubler une scène ou deux avant de disparaître dans la brume anglaise. Corps voué à la sensualité extra-terrestre, Christina Ricci tire donc son épingle du jeu sans forcer. La reluquer ainsi pendant 1 heure 36 reste finalement la seule démonstration pertinente de voyeurisme du film.