Qu’est venu faire Hideo Nakata sur le plateau de cette suite du Cercle de Gore Verbinski, lui-même reprise US du Ring japonais… d’Hideo Nakata ? Pas chômer, on s’en doute, d’autant que le cinéaste voit actuellement son chef-d’oeuvre, Dark water, refait aux Etats-Unis par le Brésilien Walter Salles. Nakata n’est pas du genre a laisser filer l’occasion de remettre les pendules à l’heure : le maître c’est lui, et Le Cercle – The Ring 2, sans retrouver le génie de Dark water, offre au moins une demi-heure, c’est énorme, de grand et beau cinéma.

A quoi reconnaît-on un maître d’un bon artisan ? A sa façon de sublimer n’importe quelle figure ou décor imposés (le cadre de l’Oregon et un casting strictement américain, par exemple), à sa manière de rester chez lui partout où il se trouve. Alors s’impose ici, immédiatement, la patte Nakata : beauté lente des cadres, précision lancinante des mouvements d’appareil, souplesse et fluidité du moindre enchaînement de plans. Les thèmes du film, eux, renvoient de près à Dark water, le film reprenant cette idée magnifique d’un fantastique naissant de l’absence, au sein de la famille, de la figure du père. D’où montée des eaux, apparition des fantômes et, pourquoi pas, reprise de la vieille recette de Ring (la cassette maudite, qui n’a strictement plus aucun intérêt ici). D’où surtout la recherche, souvent au détriment de la terreur, d’une émotion à fleur de peau dans le rapport d’une mère à son enfant. Rien d’autre ici que cela : retrouver le lien avec un enfant que le récit maltraite et isole à l’envi, transformé tour à tour en complice ou créature d’étrangeté absolue.

Sur quelques scènes, le génie de Nakata foudroie, le cinéaste nous gratifiant d’effets de terreur magnifiques (l’expressionnisme du faciès des victimes), séquences à étudier dans toutes les écoles ou purs grigris de mise en scène. Il y a bien deux ou trois scènes limite (l’attaque des cerfs), une façon de jouer avec le grand guignol parfois pompière, mais l’élégance et l’amplitude du film lui permettent constamment de repartir du bon pied. Le Cercle – The Ring 2 n’est pas le film de l’année, simplement la confirmation que Nakata, sans forcer, demeure le seul grand maître, avec Kyoshi Kurosawa, du cinéma fantastique asiatique contemporain.