Tourné tout au long de la campagne électorale américaine en 2000, Last party 2000 n’est pas tout à fait un retour sur la résistible ascension de George W.Bush vers la Maison Blanche, mais davantage un road movie politique au pays de l’Oncle Sam. On peut y voir, c’est déjà ça, un antidote revigorant à l’hystérie béate qui accompagne, depuis sa sortie, l’affreux Bowling for Columbine de Michael Moore. Moore, d’ailleurs, apparaît dans le film, pour une brève interview et le temps d’une séquence filmée lors d’un meeting de soutien à Ralph Nader, le candidat écologiste à la présidence (qui obtiendra 3% des voix, après s’être vu refuser le droit de débattre publiquement avec ses adversaires Bush et Gore). On le découvre en tribun efficace, c’est-à-dire un rôle enfin lavé de toutes les afféteries minaudeuses et hypocrites dont il infecte ses films. Dans Last party 2000, c’est Philip Seymour-Hoffman qui endosse le costume du candide en quête de réponses à ses préoccupations de citoyen électeur. Le comédien (vu chez Paul Thomas Anderson, Todd Solondz ou les frères Coen) avoue immédiatement ne rien connaître à la politique, n’avoir fait aucun effort pour remédier à cela jusqu’à présent, si ce n’est rejeter en bloc tous les dirigeants, considérés comme pourris et avides de pouvoir.

La fraîcheur naïve de ses interrogations fait du film un documentaire inoffensif, mais il a au moins le mérite de nous épargner la vulgate pathétique de Moore. Candide, Seymour Hoffman l’est vraiment, à l’inverse de Moore qui feint de l’être et se place d’emblée dans une position sentimentalo-ricanante de condescendance et de fatuité. Accompagné par les réalisateurs, il prend son bâton de pèlerin pour un long périple à travers les Etats-Unis. Au programme : congrès républicains et démocrates en forme de pathétiques kermesses vulgaires où l’on se répète mot pour mot d’un camp à l’autre, et rencontres avec Noam Chomsky, Jesse Jackson et tout ce que l’Amérique compte de José Bové locaux, de courants alternatifs, d’associations de défense des démunis ou des minorités. Un portrait en creux d’un paysage politique récalcitrant aux discours lénifiants des deux grands partis, qui certes s’est exprimé plus fort que jamais lors de la campagne 2000, mais dont on a finalement beaucoup de mal à mesurer l’audience réelle. Le film ne propose guère plus qu’une suite d’interviews et de reportages live au coeur des manifestations (où l’on peut se rendre compte de l’effrayante brutalité de la police, qui tolère à peine la libre expression dans la rue) et des congrès des candidats, mais il le fait relativement bien.