Après un premier essai concrétisé par une véritable explosion au box-office (Le Prince d’Egypte), DreamWorks est de retour avec un nouveau long métrage de fin d’année. D’entrée de jeu, le film nous est présenté comme un dessin animé événement. En plus de l’habituel budget ahurissant et des nouveaux procédés techniques mis au point pour l’occasion, une alliance de réalisateurs audacieux est à la tête du projet (dont Eric Bergeron, élève issu de l’école Gobelins et Don Paul, ancien routard de chez Disney). Mais malgré toute l’excitation suscitée par le descriptif du dossier de presse, La Route d’Eldorado déçoit principalement par son manque de personnalité.

En premier lieu, l’histoire de ce film est largement inspirée du scénario de L’Homme qui voulut être roi de John Huston. Tulio et Miguel partent en expédition afin de trouver l’Eldorado, légendaire contrée aux richesses infinies… Arrivés en terre promise, ces deux comparses reçoivent un accueil majestueux, les autochtones interprétant leur venue comme une intervention divine. La discorde s’installe alors entre les deux hommes : l’un veut partir afin de profiter de ses richesses en Occident, l’autre décide de rester pour continuer à être considéré comme un dieu… Sans pour autant être présenté comme un « remake » (si l’on excepte le contexte géographique, le scénario de L’Homme qui voulut être roi est repris tel quel), La Route d’Eldorado plagie tout de même quelques éléments narratifs du classique de John Huston. L’exemple le plus flagrant étant la séquence de démystification durant laquelle Miguel saigne au visage et dévoile, malgré lui, qu’il est un être humain ordinaire…

Par ailleurs, La Route d’Eldorado reste, dans sa réalisation, un peu trop imprégné de l’influence des films Disney. Ce qui expliquerait un tel manque d’inspiration : le plagiat étant coutume courante du côté de chez Walt… En voulant faire dans le traditionnel, les deux réalisateurs produisent malgré eux une parodie de dessin animé classique. Pour preuve, les séquences chantées du film qui semblent n’avoir été placées ici que par principe. On regrettera également le style impersonnel des dessins, bien trop proche de ce que l’on a pu voir dans Mulan, Pocahontas ou Aladdin… Au final, La Route d’Eldorado reste un dessin animé familial assez divertissant et très impressionnant d’un point de vue technique. Mais la puissance visuelle des effets numériques ne réussit pas à combler un scénario bien creux. A l’inverse de concurrents comme la Fox, Pixar ou Warner, qui cherchent à développer leur propre identité au travers de productions originales, les studios DreamWorks s’alignent maintenant sur le modèle Disney. Dommage… Mais après tout, tant qu’il y a profit, Jeffrey Katzenberg ne se soucie sûrement pas de ce genre de considérations, bassement « artistiques »…