Deux couples, deux vision de l’adultère et des sentiments, deux registres dramaturgiques (le drame et la comédie), le dernier film de Claude Berri est cassé en deux. Il ne faut pas longtemps néanmoins pour que cette audace se termine en eau de boudin. Pourtant, tout n’avait pas si mal commencé, comme en témoigne la surprenante entame qui voit un drame (l’accident de moto du fils de Daniel -Daniel Auteuil) coïncider avec un coup de foudre (celui de Daniel et de Judith -Charlotte Gainsbourg).

Ce qui déplait, au fond, c’est que la vision de l’adultère est essentiellement une vision masculine, auto centrée, machiste, un peu comme l’était déjà Une Femme de ménage, film incapable de donner la parole à son personnage féminin, de le faire exister un tant soit peu autrement que comme objet de fantasme. Berri a beau multiplier les personnages de femmes, en dernière instance, c’est toujours l’homme qui choisit de rester ou de partir, de rompre ou de continuer. Les femmes, elles, subissent, avec joie ou résignation, mais jamais elles n’ont l’avantage, toujours suspendues à la décision de celui qu’elles aiment. Cette vision old-school semble tout droit sortie d’un film des années 50 (c’est dire si le féminisme est à peine passé par là), où les femmes ont le choix entre être victimes ou vieilles filles.

Si Berri extirpe parfois de son récit la part de petitesse méprisable qui émane de ses personnages (en particulier la veulerie du personnage interprété par Pierre Arditi), il faut toujours qu’il les sauve en dernière instance, les laissant patauger dans leur médiocrité de petits bourgeois. Du moins cela vaut pour le couple Arditi / Baye, que Berri ne tente jamais de tirer vers le haut. Il faut toujours que ces deux là soient un peu ridicules, un peu pathétiques. Cet amour et cette compréhension pour les faiblesses humaines aurait pu atteindre une sorte de grandeur si dans le même temps ces ridicules là n’étaient opposés aux feux de la passion, forcément plus poignants, que vivent au contraire Auteuil et Gainsbourg. Si bien que le film s’offre comme un mea culpa un peu gênant, une justification un peu foireuse de ces « petits rien de l’existence ».

Chez Sautet (César et Rosalie), il y avait quand même un peu de transcendance, un imaginaire qui dépassait la simple comédie boulevardière. Reste que Berri saute de la profondeur à la superficialité, du drame à la comédie avec une aisance assez peu commune dans le cinéma français de ces dernière années (si ce n’est que la comédie, en tant que telle, est la part la plus infecte du film). Par moment, le film est même assez mal aimable, notamment sur ses personnages, s’autorisant une vulgarité qui confine à l’ingratitude. Il faut voir Nathalie Baye en mémère à chien ou Noémie Lvovsky en vieille fille hystérique et méchante pour le croire. Autant de masochisme surprend toujours de la part des acteurs. Dommage que Berri n’en ai pas fait un meilleur usage.