Resté sur la belle impression de Feux rouges, difficile d’envisager cet Avion : ratage complet ou pure fumisterie, gros attentat ou pet de mouche. Tout cela à la fois probablement, le film tenant autant de la commande réalisée par-dessus la jambe que de la tentative un brin expérimentale et prétentieuse de se frotter à un univers peu fréquenté par les auteurs français : pur cinéma enfantin et populaire. Un gamin découvre que l’avion que lui a offert son père juste avant de disparaître est capable de voler tout seul et de se transformer en prolongement de l’âme de son propriétaire. Le gosse passe pour un fou avant que tout le monde se rende compte qu’il dit vrai : l’avion est en fait un prototype hyper évolué destiné à l’aérospatiale.

Aussi débilitant que puisse être le scénario de L’Avion, tiré d’une bande dessinée stupide, impossible de pardonner à Kahn de se contenter d’illustrer platement les grotesques rebondissements qui lui servent de cache-misère. L’Avion est d’une pauvreté visuelle inouïe, entre téléfilm bourgeois et nanar dégénéré (la scène où le modèle réduit détruit tout dans la maison, indigne du plus navrant des impayable « Bee movies » de Canal). Dans cet entre-deux indécidable de clean et de pure folie Z, personnages et rebondissements évoluent en toute lumière, dans un état de bêtise crue transformant le film en toboggan vers la mort : une ligne droite descendante où tout s’écrase, jusqu’à l’idée même de cinéma. Pas un gramme d’imaginaire ou de poésie ici : un pur crash. Le degré zéro du divertissement mongolo.

L’Avion n’est pas aidé par ses interprètes, tous plus casseroles les uns que les autres (la gamine à l’accent provençal qui dit ses dialogues comme on récite un poème en CP, le méchant hilarant). Mais le pire réside dans le déséquilibre qui existe ici entre la propriété étouffante des cadres et de la mise en scène (plus élémentaire qu’un épisode de Syska) et l’absolu délire qui règne dans la seconde moitié, lorsque l’avion se révolte. Imaginez un remake d’E.T. produit en totale autonomie et réalisé par Patrick Sébastien (scénario, réalisation) et Jean-Michel Gibard (montage, dialogues) : voici L’Avion, candidat direct au trophée des pires bouses de l’année.