Po, panda jadis pataud, est aujourd’hui un « guerrier dragon » respecté. A la tête d’une dream-team de combattants dont il fut le fan n°1, il rayonne sur sa vallée natale, adulé par la communauté herbivore, cochons, lapinous et gallinacés en tous genres. Mais une affliction, existentielle cette fois, continue de le ronger. Qui est-il, d’où vient-il, lui dont le père n’est pas un panda, mais une oie cendrée ? Voilà l’argument de sa nouvelle quête, pour laquelle il devra s’affranchir de sa candeur et trouver la fameuse paix intérieure vantée par ses mentors. Plus facile à dire qu’à faire : avant d’atteindre le noyau de son âme, Po doit redoubler de témérité et tuer le geek débonnaire qu’il reste malgré tout.

On est donc confronté au complexe américain, très classique, de l’adulte nerdy et un peu ventru, fasciné autant que dépassé par la spiritualité orientale. Après Owen Wilson face à Jackie Chan dans Shanghai knights, ou Seth Rogen face à Jay Chou dans The Green hornet, Po (soit Jack Black, une nouvelle fois) incarne ce loser replet qui cherche à s’extraire de sa condition douillette et américaine – l’ours, bien que chinois, personnifie la balourdise occidentale – pour accéder vaille que vaille à une forme de sublimation mentale. Le premier volet racontait son improbable surpassement, et on le croyait définitivement adoubé ; le second reprend le problème à bras le corps, clamant que la transition n’est pas si évidente : on n’acquiert pas la sagesse par imitation, mais par introspection. Tout comme Po regarde avec envie les vrais maîtres kung-fu, le film lorgne sur le modèle asiatique, picorant quelques références dans la tradition Shaw Brothers : le récit est initiatique, les chemins sont tortueux, et une intrigue familiale d’arrière-fond double les doses de sentimentalisme. C’est par le biais de ce mimétisme blafard mais assumé, comiquement désespéré, que cette escapade dans une Chine animalière sait se rendre sympathique.

Toutefois, il faut bien le dire, Dreamworks confirme son retard sur Pixar. D’abord en termes de scénario, lequel mise tout sur la cocasserie de son antihéros, alors que son adversaire (un paon très propre sur lui, cousin de Fabrice Luchini) n’effraie personne. Si l’hommage à la dramaturgie hongkongaise justifie un certain fouillis narratif, l’ensemble est aplati par des nœuds dramatiques paresseux et une incapacité à générer un climax réellement décisif. Comme si, entre les gags acrobatiques, la castagne et les personnages secondaires barrés, l’attention ne savait jamais vraiment où se porter. Doucement rigolo, Kung fu panda 2 échappe tout de même au piège du dessin animé ultra-marketé, habité davantage par des peluches dérivées que par des personnages ; mais pour avancer sur la voie de la sagesse, Dreamworks a sans doute quelques progrès à faire en matière d’ubiquité.