I, Robot laissait espérer un retour en grande pompe d’Alex Proyas, resté un peu en plan depuis le remarquable Dark city, et auquel la fiction parano-cybernétique d’Asimov semblait idéalement promise. Premier indice de déception cependant, l’affiche du film, digne d’une série Z de Fred Olen Ray. Le résultat se situe pile entre ces deux extrêmes, dans une tiédeur finalement assez rassurante : loin de la maestria d’un Minority report, mais bien au-dessus du catastrophique Paycheck de John Woo. L’intrigue d’I, Robot est étonnamment limpide : en 2035, dans un monde où les robots assistent les humains, le détective Del Spooner (Will Smith) enquête sur le meurtre d’un parrain de la robotique. C’est la première surprise du film, une simplicité qui se départit d’une grande part des logiques exponentielles et métaphysiques du genre.

L’avancée du film en ligne droite, sa façon d’affronter les scènes comme autant d’épreuves, de manière basique et sans la moindre volonté de profondeur, est évidemment le premier symptôme de la résignation qui conduit Proyas à se fondre dans le moule imposé par les studios pour finalement renier son film. Pour autant, cette transparence ne vire jamais au simplisme et permet de faire ressortir, scène après scène, une réalisation extrêmement dynamique, cette candeur de l’approche déjà vue dans Dark city qui porte de la même grâce une scène intimiste (tout ce qui tourne autour du gentil robot Sonny) ou un démentiel soulèvement de robots aryens près à asservir l’humanité. Le principe a cependant ses limites, et empêche les plus belles scènes (l’ancienne génération de robots NS-4 qui, dans les faubourgs nocturnes de la cité, tente de bloquer la révolution des terrifiants NS-5) d’embraser véritablement le film.

Force et limite d’I, Robot qui trouve, dans l’interprétation souple et énergique de Will Smith autant que dans la relative beauté visuelle de l’ensemble des défis techniques relevés, une sorte de coussin d’air à même de porter l’ensemble sans ennui ni déplaisir, sans pour autant s’imprimer durablement dans les esprits Au fond, I, Robot est au blockbuster ce qu’un Highwaymen, le petit film de Robert Harmon, est à la série B d’un été finalement d’assez bonne tenue, loin du désert de l’année passée : un divertissement sans lendemain, plutôt enlevé et loin de toute boursouflure, dont personne, pas plus cinéaste que spectateur, ne ressortira honteux.