Un court + un moyen métrage autrichiens, ça sent l’ennui à plein nez. Et pourtant, Flora et Inter-View forment un diptyque assez étonnant sur la solitude urbaine et la douloureuse sortie de l’adolescence, l’âge où beaucoup se cherchent encore alors que la société exige qu’ils se soient déjà trouvés. C’est à peu près la même figure féminine qui traverse ainsi les deux films : jeunes adultes au physique ingrat, mises à mal par leur environnement, en quête d’un amour banal, d’une histoire dénuée de romanesque, pas follement excitante mais simplement rassurante. Flora prend des cours de danse et rêve de devenir la partenaire d’Attila, prince charmant au rabais qui secoue les hormones de notre blonde au visage triste. L’héroïne d’Inter-View, quant à elle, officie dans une entreprise florale où elle n’est ni heureuse ni désespérée, « juste là ». Elle fait toutefois la connaissance d’un beau jeune homme qui lui offre le réconfort tant espéré. Mais son éphémère bonheur sera vite estompé par sa rencontre avec un garçon étrange, qui passe son temps à interviewer les quidams en pensant trouver une réponse à ses angoisses existentielles…

Si le talent de Jessica Hausner est à peine décelable dans Flora, conte du quotidien à la cruauté facile et contestable, la cinéaste surprend davantage avec Inter-View, qui échappe à une désespérance convenue grâce à la maîtrise de sa mise en scène. On retrouve en tout cas dans chaque film l’influence de Michael Haneke, dont Hausner fut l’élève et l’assistante (sur Funny games). A l’instar de son mentor, l’auteur travaille sur l’oppression exercée par la ville autrichienne, son climat froid et délétère, les difficultés de communication qui ne trouvent parfois que la violence comme exutoire. Lumière glauque, cadrages légèrement décalés, rigidité dérangeante, acteurs impassibles : on connaît la chanson, mais Jessica Hausner fait suffisamment preuve d’intelligence et d’instinct visuel pour que son cinéma ne ressemble pas seulement à un devoir de première de la classe. Attendons donc que la jeune femme s’émancipe des thématiques hanekiennes pour voir ce qu’elle a vraiment dans les tripes. Une occasion qui ne saurait tarder puisque son premier long métrage, Lovely Rita, est présenté cette année à Cannes dans la section « Un Certain regard ».