Après l’excellent Un Jour sans fin, la suite de l’oeuvre d’Harold Ramis s’est révélée bien moins convaincante, pour ne pas dire décevante avec le très moyen Mes doubles, ma femme et moi et le totalement raté Mafia blues. Le cinéaste serait-il l’homme d’un seul film ? Tout porte à le croire même si sa lente et inexorable descente vers la médiocrité est provisoirement interrompue grâce à Endiablé. Car sans être une franche réussite, ce remake d’un film de Stanley Donen, Fantasmes (1967), est suffisamment inventif pour qu’on le qualifie de sympathique, quoique mineure, comédie.

Endiablé met en scène un terne et pataud petit employé de bureau, Elliot Richards (Brendan Fraser, étonnamment drôle), que ses collègues fuient comme la peste. Pour conquérir la femme aimée -qui ignore jusqu’à son existence-, il est prêt à tout, même à conclure un pacte avec le diable. Les termes du contrat sont classiques : sept vœux en échange de son âme, mais son exécution le sera beaucoup moins. Car ici pas de bonhomme tout rouge aux pieds fourchus et aux oreilles pointues comme le veut l’iconographie populaire, mais une princesse des ténèbres perchée sur des talons aiguilles, un peu vilaine et surtout très espiègle. Si chacun des souhaits d’Elliot est immédiatement exaucé, il l’est toujours sous une forme pervertie. Elliot désire être riche et puissant, il le devient… en la personne d’un narcotrafiquant colombien. Il souhaite être un grand sportif et le voilà devenu un immense basketteur (dans tous les sens du terme), même si son gigantisme n’a pas atteint deux parties fondamentales de notre anatomie : le cerveau et la quéquette.

Il en sera ainsi à chaque fois dans cette déclinaison drolatique et critique des rêves bon marché, richesse, puissance, célébrité, etc., de tout Américain moyen. Dommage que les « malfaçons » des voeux soient parfois trop prévisibles -sportif équivaut forcément à crâne vide, artiste à pédé…- et les histoires, mais n’est-ce pas un défaut inhérent au genre, le film à sketches, de qualité inégale. Ce que l’on retient alors, c’est l’impressionnante performance de Brendan Fraser. Alors que Liz Hurley use et abuse de sa plastique irréprochable par l’emploi d’innombrables tenues affriolantes (on pourrait appeler ça le syndrome Drôles de dames, celui dont sont atteintes ces actrices-mannequins avant tout employées pour leur physique…), Brendan Fraser se livre, quant à lui, à un prodigieux show transformiste, à tel point qu’il est parfois méconnaissable. Bref, une gentillette et plutôt drôle réflexion sur l’identité, dans laquelle un homme mal dans sa peau à force d’en changer finira par être transformé et s’affranchira du mirage amour, gloire et beauté.