Downtime est un film anglais qui a la particularité, ô combien louable, d’avoir offert une dimension supplémentaire à un genre délicat à traiter au cinéma : le huis clos. Chrissy (Susan Lynch), une femme sur le point de se suicider avec son fils du haut d’un immeuble de 24 étages, en est dissuadée par un ex-psychologue de la police, Rob (Paul McGann). Le lendemain, Rob retourne dans cette tour sinistre de la banlieue londonienne pour inviter Chrissy à sortir avec lui. Le repoussant dans un premier temps, elle ne lui résistera pas longtemps lorsqu’ils se verront prisonniers d’un ascenseur. Celui-ci vient d’être déréglé par une bande de voyous qui est à l’origine du délabrement de l’immeuble et de l’angoisse constante qui y règne.
Malgré des dialogues parfois incongrus voire caricaturaux, Downtime ne perd pas la mesure et gagne une place méritée entre L’Ascenseur (1983) de Dick Maas et Piège de Cristal (1988) de John McTiernan. En effet, le film fait alterner intelligemment et progressivement action, suspense, drame social et, grâce à ses situations étranges et à des personnages sombres et inattendus, vire dans le fantastique. Son propos est renforcé dans la mesure où la réalité qu’il peint dépasse malheureusement la fiction, et qu’elle est par moments tellement paroxystique qu’elle atteint inévitablement le fantastique. On n’est plus dans le réalisme poétique d’un Marcel Carné ou dans le réalisme social d’un Ken Loach, on est dans un nouveau genre : le réalisme fantastique. À cette humble réussite vient s’ajouter l’idée du huis clos, forçant au fur et à mesure notre attention sur les personnages qui gagnent notre sympathie et sur le décor glauque de la tour infernale, véritable méchant de service, rivale incontestée de nos deux acteurs principaux. Plus les scènes à retournements fantastico-dramatiques s’accumulent, et plus le spectateur est à bout de nerfs, tellement son angoisse a été extrêmement bien gérée au fil des rebondissements. Tous ces ingrédients ont, semble-il, permis au scénariste Caspar Berry (il a fait des études anthropologiques) et au réalisateur Bharat Nalluri d’exorciser un malaise social. Downtime divertira donc tout en sensibilisant son public à un contexte social particulier, notamment, par un cinéma de genre, ici très bien revisité.