Vinnie Jones fut, dans les années 80, le bad boy le plus célèbre du football anglais. Défenseur de la médiocre équipe de Wimbledon (un assemblage de brutes sur-testostéronées aux allures de boeufs fous), il fut LE boucher officiel des surfaces de réparations, spécialiste des coups bas en tout genre, des expulsions haineuses et des mauvais gestes bien cradingues. Son coup d’éclat fut de revendiquer haut et fort un esprit anti-sportif aux antipodes du traditionnel fair-play britannique. Plus fort : il édita une vidéocassette pirate faisant l’apologie de la violence où l’on apprenait tous les secrets de son art (comment casser les rotules d’un attaquant adverse ou, entre autres, briser la carrière d’un joueur à l’aide de crampons moulés savamment acérés).

Devenu depuis second couteau à Hollywood, Jones multiplie les rôles de brute débilitante chez Brukheimer et autres producteurs mongolos. Le dossier de Carton rouge ne dit évidemment rien du passé du joueur. On y apprend simplement que Jones fut une « authentique » star du ballon rond. Le film tente même de faire croire à la sympathie profonde du gars : il y interprète une ex-gloire victime d’une terrible machination, finissant en prison. Là, il prendra peu à peu le contrôle de l’équipe des prisonniers et battra à plate-couture des matons diaboliques (David Hemmings en Machiavel de funèbre foire aux lampions). Malgré sa tentative d’humaniser le personnage sur fond de gestes héroïques et de musique gluante, Carton rouge finit heureusement par craquer lors d’un final invraisemblable : match où pleuvent les coups sous la ceinture, les craquements d’os, les ruptures de ligaments et autres coups de boule atomiques.

Mis en scène à la manière d’un clip blafard aux relents de réalisme social bidon (la prison, cet enfer de virilité non canalisée, pas une femme n’apparaissant dans le film), Carton rouge est mou comme un ballon crevé. Au fond, il ne sert qu’à faire vivre les rêves les plus fous, démontrant sous couvert de documentaire erroné que Vinnie Jones sait aussi jouer au football. Il y marque un but, fait une passe décisive, ne prend aucun carton : mieux qu’en toute sa carrière de joueur de rollerball.