Inspiré de divers spectacles musicaux à succès (dont le célèbre Tap Dogs), Bootmen n’est pourtant pas le projet mercantile que l’on pouvait redouter. Avec une bonne foi à toute épreuve, Dein Perry construit son récit en reprenant l’innovation majeure de ses créations passées : les claquettes urbaines. Pour information, la chose consiste à mettre sur scène un certain nombre de jeunes gars baraqués, de les foutre en marcel, et de les faire taper des pieds dans un environnement métallisé -une usine de préférence. Un peu de guitare électrique en fond sonore, et les filles deviennent hystériques, pires que devant Fred Astaire : normal, les mecs font beaucoup plus de bruit, et, surtout, ils ont un plus beau cul.

Autour de ça, peu d’imagination. On a droit à l’éternelle ascension du héros prolétaire, sauvé par ses talents artistiques et ses idées avant-gardistes (enfin, dans un registre très particulier). Ouvrier métallurgiste passionné par les claquettes, Sean décide en effet de monter un numéro d’un nouveau genre avec quelques collègues de travail. Le spectacle s’appellera Bootmen et ouvrira au groupe d’amis les portes du succès. Mais pour parvenir à la reconnaissance, Sean aura fait beaucoup de sacrifices, et notamment la perte de son frère, tué par une bande rivale. Heureusement, le danseur émérite est soutenu par la pouf’ de service, sorte d’Olivia Newton John mal dégrossie tout droit sortie d’une version cheap de Grease. Certes, ç’aurait été plus marrant que Sean partouze avec ses copains au lieu de se taper la blondasse, mais on peut pas tout avoir. On se contentera donc des séquences de claquettes, plutôt bien rythmées et découpées, ce qui n’est déjà pas si fréquent. Les plus sensibles iront même jusqu’à verser leur petite larme lors de l’ultime numéro, véritable maelström visuel et émotionnel. On y voit Sean tournant sur lui-même et englobant dans son mouvement et en surimpression les souvenirs de son existence. Notre gueule d’ange a triomphé en un tour de jambes extatique du misérable destin qui lui était promis. Le plus grave, c’est qu’on en redemande.