Cette saisonnière bluette en bikini est un objet curieux, trimballant son inutilité -totale- avec une sorte de nonchalance qui, de loin en loin, lui permet de faire passer quelque chose, une singularité peut-être (mais ce serait un grand mot), en tout cas quelque chose de très minime et insuffisamment accrocheur. Inutilité totale : Blue crush ne raconte rien (sinon une romance de plage entre une surfeuse hawaïenne et un quaterback en stage détente + le dépassement par la surfeuse d’un traumatisme consécutif à un accident sub-aquatique), ne montre rien (sinon des grosses vagues et des bikinis). C’est, littéralement, un film en vacances. En vacances de récit, en vacances de mise en scène, mais aussi en vacances tout court : le plus réussi dans le film n’est pas le déluge de scènes de surf, filmées et montées en dépit du bon sens, mais tout ce qui touche à l’inactivité, aux congés, et qu’une poignée de personnages creux comme des vagues tente de mettre à profit.

Anne-Marie, donc, la jeune surfeuse qui doit vaincre ses angoisses pour participer à la super coupe des filles, s’amourache d’un quaterback de passage, logé avec toute son équipe de foot dans un hôtel à touristes où elle travaille comme femme de ménage. Devenue la coqueluche de toute la team, elle accepte de donner aux molosses des cours de planches et les accompagne lors de soirées GO avec concours de danses hawaïennes et remise de colliers en fleur. On touche là le véritable cœur du film. Les vraies stars de Blue crush, ce sont les impayables bibendums de l’équipe de foot, souvent d’une beauferie hallucinante (ils se paient des putes pour des nuits d’orgies, et laissent au petit matin la moquette recouverte de vomi, de bouffe, de capotes usagées), mais presque attachants par leur façon d’être à mille années-lumière de ce qui se passe dans le film. Ce sont presque de beaux personnages de fond de plan (pendant qu’Anne-Marie se laisse conter fleurette au premier plan, on les aperçoit au fond tripoter leur gros bide avec un air de contentement quasiment orgasmique), de ceux qui font comme si de rien n’était, des « faites comme si on n’était pas là ». Malgré leur bonhomie d’ogre, Blue crush, qui ne leur rend pas vraiment justice, n’en reste pas moins un film sans importance.