Alors qu’il vient tout juste de présenter en France L’Echine du diable, film d’auteur fantastique produit par les frères Almodovar, Guillermo Del Toro change complètement de registre avec un gros calibre hollywoodien, la suite des aventures de Blade. En reprenant le flambeau de Stephen Norrington, Del Toro ne se contente pourtant pas de surfer sur le succès du premier volet mais imprime au contraire sa marque, et impose son goût pour les comics et les mangas. Résultat : une avalanche de combats parfaitement maîtrisés et de somptueux effets spéciaux au détriment d’une narration plutôt maigrelette. Pourtant, Blade 2 part d’une bonne idée scénaristique avec l’introduction dans l’échiquier de terribles créatures, plus puissantes et plus féroces. Face à ce nouveau danger, les vampires font alors appel à celui qui était auparavant leur ennemi et Blade se retrouve à la tête d’un commando composé de combattants qui étaient autrefois chargés de l’éliminer. Del Toro n’exploite pas complètement cette situation paradoxale qui aurait pu donner lieu à un jeu plus trouble à base de trahison ou de mensonge. Quelques répliques « couillues » et trois-quatre bastons suffiront à régler le problème. Car Blade 2 repose uniquement sur le rythme de ses combats qui composent l’essentiel de l’action.

Bénéficiant d’un budget conséquent, Del Toro semble avoir donné libre court à ses fantasmes dans ce film qui rapproche encore un peu plus le cinéma du jeu vidéo. Les personnages y sont dotés d’une psychologie des plus succincte, notamment Blade lui-même, véritable vignette bidimensionnelle réduite à l’état d’effigie et fonctionnant uniquement sur la pose (voire le plan qui s’attarde sur la façon dont il remet ses lunettes de soleil). En ce sens, Blade 2 c’est un peu l’anti-Spider-man, ce qui n’en fait pas pour autant une oeuvre à négliger, bien au contraire. C’est dans les multiples combats, véritables prouesses techniques au timing impeccable que réside l’intérêt principal du film. Plus préoccupé de trouver un style visuel qu’une consistance à son histoire, Del Toro impressionne aussi dans la figuration des monstres, donnant vie à un extraordinaire bestiaire. Cousin lointain du Vampires de John Carpenter, Blade 2 perpétue la lignée des films fantastiques « virils » à base de castagnes et de vannes qui « tuent » même si chez le cinéaste américain affleure souvent une émotion qui fait ici cruellement défaut…