Attention, petit malin. Le nouveau venu Matthew Parkhill a de l’ambition, un sens sidérant de la débrouille et un kit complet du petit tapageur. Attraction fatale dit tout cela frontalement, comme un speech de VRP : même énergie, même naïveté, même trivialité. On commence par une comédie romantique très nunuche qui reprend les standards du genre : le triangle amoureux de dernière minute, la belle flashant pour un jeune premier lors de son enterrement de vie de jeune fille. Le mari cocu, un gentil coq en patte, se doute vaguement de quelque chose. Puis a mi-parcours, on vire dans le thriller manipulateur : les personnages pivotent à 180 degrés, les petits détails qu’on croyait fumeux trouvent leur justification. Conclusion : manipuler les gens et les images, c’est brillant mais quand même très dangereux.

Logiquement, cette mise en scène « Rubix cube » atteint sa cible, mais sacrifie tout le reste. Parkhill ne pense qu’à restituer l’exacte symétrie de sa première partie. Conséquence : il sort incessamment de la fiction pour expliquer, commenter. Et toujours via le même vecteur, le personnage du faux cocu qui endosse simultanément les habits de maître théoricien (expliquer le pourquoi du comment) et de metteur en scène (poursuivre la manipulation). Pire, la théorisation omnisciente du film (des personnages à l’esthétique, tout est cliché) le condamne à ne gratter qu’une seule corde, lui donnant un aspect rachitique. Hormis son dispositif chéri, cet objet ricanant zigzague d’un genre à l’autre, se nie en permanence comme s’il n’osait finalement rien assumer. Ni le cynisme puisque l’arroseur sera finalement arrosé. Ni la romance, horripilante de niaiserie et définie comme telle par la suite. Ni même le thriller, réduit à des exposés indignes d’un De Palma pour les nuls.

Malgré cela, Parkhill aura sûrement ce qu’il souhaite : entrer à Hollywood en néo-David Mamet, épater le chaland en ruminant dans sa caboche les scénarii les plus rutilants d’ingéniosité. C’est bien parti : Attraction fatale a déjà bluffé Sundance et Deauville par sa simple sélection, et mystifié son casting (Parkhill s’est offert le chef-op d’Almodovar et l’acteur montant d’Y tu mama tambien) par sa simple existence. Petit malin, on vous dit.