Avec ses airs de Starship troopers du pauvre, Arac attack arrive fin juillet à la manière du blockbuster popcorn qui manquait tant à cet été qui ne veut pas commencer. Produit par Emmerich, le film ne vaut évidemment pas pour la portée très basse de son propos. Des années 50, il conserve l’esprit SF protectionniste le plus grossier -des monstres très méchants qui mettent en péril l’équilibre d’un petit village de Texans bedonnants-, la niaiserie hypocrite (la vérité sort toujours de la bouche des enfants, à condition quand même que ceux-ci soient de bons élèves bien éduqués) et le puritanisme le plus arriéré (on ne couche pas avant le mariage).

Si l’on passe sur le racisme latent qui irrigue le film -le seul black du film est un sympathique hurluberlu mi-homme mi-singe qui sur-joue jusqu’à s’étouffer dans ses grimaces-, restent des effets spéciaux hors du commun ; un état d’esprit très fun ; une action quasi-ininterrompue qui rappelle aussi qu’Emmerich est avant tout un formidable artisan à l’Américaine dont le sens inné du spectacle n’est pas à bouder. Arac attack, à son meilleur, est une superproduction pure et dure qui parvient à tirer un maximum d’énergie de son capital technique. Quelques scènes inouïes, comme la poursuite de motos-cross par d’atroces araignées sauteuses géantes, ramènent directement à la magie des films de Ray Harryhausen. Les images de synthèse trouvent ici une dimension viscérale et fantasmatique proche de la perfection. En outre, le catalogue arachnéen offre un luxe de représentations à la précision quasi-scientifique : tarentules surgissant de leur terrier à la manière d’éclairs noirs et velus, énormes mygales à la lenteur hypnotique, lycoses gluantes, salticides bondissantes, chaque espèce y trouve son compte le temps d’un mini-défilé révulsif. La scène où les monstres s’échappent du laboratoire est magnifique dans sa façon de mélanger une telle variété d’exemples que l’arachnophobe se trouve pris de vertiges, comme dépassé par la multitude de bêtes à huit pattes qui envahissent l’écran.

On peut regretter la progressive perte de cet état clinique de fascination et de terreur mêlées au profit de la farce. Lorsque le film patine, les monstres se transforment en gremlins anthropomorphiques et ricanants du pire effet. L’horreur du premier tiers passée, Arack attack se transforme en bête film de siège oscillant entre courses-poursuites, comédie infantile, effets de claustration suffocants (belle utilisation de la matière crasseuse et collante des toiles) et pathos en toc. Rien de bien grave cependant : Arac attack tient son pari en ce qu’il laisse en mémoire quelques visions d’épouvante pure qui le placent, moyens aidant, en tête des plus généreux et mémorables films arachnoïdes jamais réalisés.