« Montrer le réel tel qu’il pourrait être et non pas tel qu’il est », voilà la volonté qui anime Robert Guédiguian dans chacun de ses films. A l’attaque ! pousse l’idée à son maximum en explorant au cœur d’un même film plusieurs voies. C’est, en quelque sorte, une application de la loi pataphysique (la science des solutions imaginaires) qui prône l’existence d’une infinité de possibles ; la structure d’A l’attaque ! étant une arborescence dont le cœur serait l’appartement des deux personnages principaux : des scénaristes. Robert Guédiguian a en effet choisi de reproduire le dispositif scénaristique utilisé par Julien Duvivier dans La Fête à Henriette : deux scénaristes confrontent leurs points de vue, et l’histoire qu’ils imaginent est montrée au fur et à mesure aux spectateurs, séquences rejetées inclues.

L’histoire que sont en train d’écrire sous nos yeux Xavier et Yvan justement, c’est celle de la famille Moliterno et Cie. Une famille élargie qui s’acharne à faire fonctionner un garage mécanique non loin de l’Estaque à Marseille. Chacun a sa fonction dans ce petit monde qui fait swinguer l’accent du Sud : Gigi et Jean-Do sont mécanos, Marthe fait les factures et Lola, jeune veuve, donne un coup de main à qui en a besoin, le tout sous le regard bienveillant de pépé Moliterno, vieux révolutionnaire italien. Les jours s’écoulent, tranquilles malgré les difficultés, jusqu’à ce que leur principal commanditaire mette la clé sous la porte sans leur régler un centime. La flamme révolutionnaire se réveille alors, et toute l’équipe passe à l’attaque !

Intégrant à son film une réflexion formelle et thématique sur ces œuvres précédentes, Robert Guédiguian décide aussi de répondre cinématographiquement aux critiques qui le taxaient tour à tour de manichéisme, populisme et vulgarité… (et ça continue !). Ici, il fait preuve d’un humour débridé et emporte ses acteurs dans un tourbillon de situations délirantes. Parodie de comédies musicales, de situations de romans à l’eau de rose, de films d’action, de séries Z, il ne se refuse rien. Et le plus beau, c’est que les acteurs le suivent sans aucun problème. Leur « charge d’humanité » fait tout passer : drame, comédie… on rit, on pleure… un vrai florilège d’émotions.