On s’était promis de ne plus jamais céder à cette terrible torture : la critique tome par tome d’un manga, exercice on ne peut plus répétitif si on n’y prend pas garde. Mais voilà, le premier épisode de Dark Angel nous avait laissé perplexe. Il y avait du potentiel, ça ne faisait aucun doute, mais de là à crier au chef-d’œuvre, on demandait à poursuivre l’expérience avant de donner un avis définitif. Ca tombe bien, le deuxième tome vient de sortir, et il confirme, en quelque sorte, la plupart des espoirs qu’on avait placés en Dark Angel. Ca n’est effectivement pas le chef-d’œuvre du siècle. Mais c’est un manga qui tient plutôt bien la distance, ce qui n’est déjà pas si mal.

Le précédent opus, majoritairement concentré sur un affrontement entre Lord Dark, gensei du Sud et Lin, gensei du Dragon Bleu, était un peu brut de décoffrage et se limitait de par le fait à une mise en bouche intrigante mais un peu frustrante. Ce deuxième tome, plus touffu, fait toujours la part belle aux combats à l’asiate et à la magie proto-taoïste. Mais il laisse plus de place à la « psychologie » des personnages et aux circonvolutions géo-politiques qui animent le Landerneau des seigneurs des 5 empires. Comme souvent dans la culture anime-manga, tout n’est pas aussi simple ni manichéen qu’au premier abord. Et le gentil héros djeunz n’est pas aussi propret qu’il n’en a l’air. La fin de ce deuxième tome laisse même présager une nature démoniaque au sein de l’âme de Dark – cela dit, le titre annonçait un peu la couleur.

Evidemment, tout ça n’est pas d’une extravagante originalité, à l’image d’un dessin un peu compassé et parfois un peu bancal*. Le thème de l’Ange Noir a déjà été archi-rabâché, que ce soit dans l’animation (Escaflowne), voire dans les jeux vidéos nippons (Final fantasy). Mais soit, Dark Angel est une œuvre « classique », de bonne facture, un peu saoulante pour les néophytes, mais pour le moment sans grande surprise. Quoique… On annonce un troisième tome centré sur un tout autre protagoniste, Lin, la gensei du Dragon Bleu. Dark Angel se voudrait-il un manga « choral » à la Robert Altman ? Si c’était effectivement le cas, il se révélerait peut-être plus intéressant que prévu. Affaire à suivre ?… J’ai bien peur que oui…

* surtout au niveau des visages, mais on peut sans doute le reprocher au fait que le manga ne soit pas publié ici dans le sens original de lecture, et que les cases soient donc inversées, ce qui peut parfois se révéler assez catastrophique du point de vue de la perspective et des proportions.