Dans le premier tome de Belzarek qui avait pour titre Au nom du père, Chrétien de Béziers avait encore l’espoir d’être sauvé par sa foi et pensait ne pas avoir à renoncer à Dieu. Mais c’était sans compter sur les pouvoirs de Belzarek, son père. Maléfique, destructeur, le prince des Ténèbres a pris possession du corps de son fils et rien ne peut arrêter désormais son envoûtement. La Messagère de l’enfer s’ouvre sur l’invocation d’une femme aux forces du mal et le sacrifice d’une chauve-souris. L’incube fait son apparition. Il sort de la gueule sanguinolente de cette bête clouée à un arbre. Chrétien ne sait pas encore que, par l’intermédiaire de cette sorcière, il va connaître une partie de son destin. Il n’a plus rien à attendre de son passé. Il subit son combat intérieur et s’enferme progressivement dans une solitude dont il ne peut sortir qu’en acceptant sa condition de possédé.

Schimpp et Lalia imaginent des personnages tourmentés. Dans une ambiance de chasse aux sorcières, ils mettent en scène des personnages perdus, tant du côté des inquisiteurs que des démons. L’univers qu’ils imaginent est sombre, et cette impression d’étouffement est renforcée par la menace qui pèse sur le héros. Chrétien est pathétique, inquiétant. Il est le vecteur des pires souffrances. Tout lui échappe, car rien ne l’avait préparé au calvaire qu’il est en train de subir. La force des dessins réside dans les regards, dans les expressions de ce visage déformé par la peur. Il tremble de tout son corps, il redoute le moment où la bête va prendre le dessus et où il ne pourra plus rien contrôler. La tension est à son comble… Les alliés du Bien ne sont pas pour autant des anges. Schimpp et Lalia les imaginent aussi laids que les serviteurs du Mal. Il ne semble pas y avoir plus de salut pour les « braves » que pour les âmes faibles. Les auteurs cultivent l’ambiguïté et le paradoxe. Il n’y a pas vraiment de bons. Il n’y a que des méchants. Des accords secrets, des intérêts communs lient à jamais les défenseurs de chaque camp, et c’est ce qui fait tout l’intérêt de cette histoire. Seul Chrétien apparaît en victime d’une fatalité qui le dépasse. Mais ces répits ne durent que l’instant d’une respiration, comme un homme qui se noie et connaît le sursis le temps de remonter quelques secondes à la surface.